Entre une marque mémorable et une oubliable, la différence ne tient souvent qu’à un fil : la capacité à raconter une histoire qui marque les esprits.
Dans l’univers du marketing B2B, deux entreprises aux produits ou services similaires peuvent connaître des destins radicalement opposés. L’une traverse les années en laissant une empreinte durable, l’autre disparaît dans l’anonymat des messages promotionnels. La différence ? Un bon storytelling d’entreprise.
Pourtant, si toutes les entreprises B2B ont déjà entendu parler de cette approche narrative, pourquoi si peu osent-elles franchir le pas ? Comment cet art de transformer les récits peut-il concrètement impacter vos performances commerciales ? Et surtout, pourquoi est-il temps de réconcilier storytelling et copywriting, plutôt que de choisir entre ces deux leviers de content marketing ?
Pour répondre à ces questions, Benoit (Growth Marketer chez Plezi) a reçu Camille Gillet (consultante en storytelling) lors d’un Plezi Décode. Si vous avez manqué ce live, pas de panique : nous décodons cet échange dans l’article.
Le storytelling, qu’est-ce que c’est ?
Par définition, le storytelling est souvent décrit comme l’art de raconter et vendre une histoire. En français, on parle aussi de “communication narrative”. Pour Camille Gillet, c’est un savant mélange d’émotions, de persuasion, d’identification et de valeurs.
Le storytelling consiste à créer le méta-récit d’une entreprise, et de raconter une histoire à des fins de communication. Contrairement aux idées reçues, cette méthode n’est pas uniquement réservée aux grandes marques B2C mais bel et bien à toutes les entreprises.
Le storytelling est une arme pour séduire, mais aussi convaincre et vendre. Cette narration convaincante améliore la proposition de valeur d’une entreprise aux yeux de son public… Et peut faciliter le cycle de vente. 71 % des acheteurs B2B achètent lorsqu’ils perçoivent une valeur personnelle dans une entreprise (par exemple véhiculée grâce au storytelling), selon une étude menée par Google en partenariat avec Motista et CEB.
Storytelling et copywriting : quelles différences ?
Le storytelling et le copywriting sont deux techniques complémentaires, mais différentes. Pour Camille Gillet, “le storytelling se concentre sur la création d’un méta-récit d’une entreprise, on pose la narration d’une histoire de marque. Le copywriting se concentre sur sa mise en œuvre, sur la traduction de ce message clé en discours vendeur”.
En d’autres termes, le storytelling est l’art de raconter une histoire captivante pour transmettre des idées, de façon immersive. Le storytelling cherche à capter l’attention, susciter l’émotion de l’audience, et créer une connexion entre l’entreprise et son public. Cette stratégie marketing est souvent utilisée pour renforcer l’identité de marque et donner vie aux produits, grâce à des récits mémorables.
De son côté, la définition du copywriting est la suivante : c’est l’art de rédiger du contenu persuasif, pour inciter le lecteur à effectuer une action spécifique (acheter un produit sur le web, télécharger des contenus type lead magnet, s’inscrire à une newsletter, etc.).
C’est une technique marketing qui vise à convaincre un public cible qu’une solution répond à ses besoins, désirs et objectifs. L’idée est d’utiliser des mots percutants et des arguments de vente convaincants, pour persuader le lecteur… En fonction de son niveau de conscience.
Pour comprendre la réelle distinction entre le storytelling et le copywriting, un des meilleurs exemples est celui de Flowbow.
Le storytelling de cette entreprise française B2B est celui de la formation qui libère les potentiels, de la société où chacun peut évoluer selon ses aspirations… Pour toutes les entreprises qui veulent faire de la montée en compétences un moteur d’épanouissement. Son copywriting se traduit par « Apprenez à naviguer » : c’est sa signature, son message qui traduit concrètement cette vision d’autonomisation par l’apprentissage.
L’un ne va pas sans l’autre. Arrêtons de choisir entre storytelling et copywriting, pour raconter des histoires impactantes et les traduire en messages percutants auprès d’une cible.
Pourquoi le storytelling devrait être une priorité (surtout en B2B) ?
Prenons l’exemple d’une marque B2B sans storytelling. Et donc sans promesse narrative. Sans histoires à raconter, sans émotion à transmettre, sans valeurs à communiquer.
Sans storytelling, l’entreprise se prive de connexion émotionnelle et relationnelle avec son audience. Reléguer le storytelling et les histoires au second plan, c’est capitaliser uniquement sur les produits ou services, et leurs caractéristiques. Ou autrement dit, c’est s’adresser uniquement au cerveau rationnel, en oubliant de répondre aux besoins émotionnels de sa cible de clients. C’est une erreur !
Camille Gilet le confirme : “sans mise en place du storytelling, on ne se concentre que sur l’acte d’achat. On propose simplement une expérience client. Est-ce suffisant pour connecter, vendre, fidéliser ? Non. D’où l’intérêt d’utiliser la narration, au service des relations qui durent !”
Le storytelling d’entreprise : une arme secrète contre la banalisation dans un environnement B2B où les solutions se ressemblent de plus en plus, le storytelling d’entreprise devient l’élément différenciant par excellence. Quand vos concurrents alignent les mêmes arguments techniques et les mêmes promesses de ROI, votre récit d’entreprise crée cette singularité qui fait pencher la balance. Il transforme votre entreprise en entité unique, avec ses propres valeurs, sa vision et son histoire. Plus qu’un simple fournisseur, vous devenez un partenaire avec lequel vos clients peuvent s’identifier et projeter leur propre réussite. C’est ce storytelling d’entreprise qui vous sort de la guerre des prix pour vous positionner sur le terrain de la valeur perçue et de la préférence émotionnelle. Parfait pour votre stratégie d’acquisition !
Le storytelling est un atout pour renforcer la mémorisation et la préférence, au moment de prendre une décision d’achat. Parfait pour votre stratégie d’acquisition !
Comment faire un bon storytelling B2B ? 5 conseils clés
Oui, le storytelling est un élément clé en B2B, pour renforcer une stratégie marketing. Mais comment l’utiliser intelligemment et efficacement ? Voici 5 conseils clés, partagés par Plezi et Camille Gilet lors du Plezi Decode :
Communiquer de “valeurs à valeurs”
Lorsque vous posez les bases de votre stratégie marketing, il est important d’identifier vos personas. Et si ce n’est pas encore fait, nous vous aidons dans ce guide complet à définir vos buyer personas marketing.
Cependant, si les caractéristiques de vos personas sont importantes pour votre stratégie marketing, c’est un tout autre élément qui prime pour votre travail de storytelling B2B. Quelles sont les valeurs de votre cible ? Comment font-elles écho aux vôtres ?
Ne focalisez pas toute votre attention sur le rôle de votre cible (CEO, responsable marketing, chargé de communication…). Concentrez-vous sur leurs valeurs, pour mieux les intégrer dans l’histoire à raconter.
Cette approche « valeurs à valeurs » va bien au-delà d’un simple exercice de communication. Elle crée une résonance profonde qui transcende les arguments rationnels classiques. Quand vos valeurs d’entreprise s’alignent authentiquement avec celles de vos décideurs, vous ne vendez plus seulement une solution : vous proposez un partenariat idéologique. Cette concordance génère une confiance instinctive et durable, car vos interlocuteurs pressentent qu’au-delà de la transaction commerciale, ils s’associent à une entreprise qui partage leur vision du monde. Attention cependant : cette authenticité ne se fabrique pas. Vos valeurs doivent être incarnées dans vos actions, vos choix stratégiques et votre culture d’entreprise. Toute dissonance entre le discours et la réalité détruira instantanément cette connexion si précieuse.
Savoir identifier les conflits narratifs
Les histoires qui utilisent le storytelling s’appuient sur des conflits (et des résolutions), pour présenter des situations auxquelles l’audience peut s’identifier. En tant que marketeur B2B, votre rôle est d’identifier les différents conflits narratifs. Puis de présenter les changements proposés par votre entreprise.
Pour y parvenir, Camille Gilet recommande de s’inspirer du modèle des 3 types de conflits présenté par Donald Miller. Ce concept est simple : le storytelling permet d’identifier 3 types de conflits rencontrés par les personas. Les conflits externes, les conflits internes et les conflits philosophiques.
Prenons l’exemple de la marque Swile. Les DRH et dirigeants rencontrent :
- Un conflit externe : « J’ai besoin de gérer les titres restaurant et avantages salariés sans complexité administrative »
- Un conflit interne : « J’ai besoin que ma politique RH montre que je suis un dirigeant moderne, à l’écoute de ses collaborateurs »
- Un conflit philosophique : « Les avantages salariés ne doivent plus être une contrainte mais un véritable levier d’engagement et de bien-être »
Pour répondre à ces conflits, le storytelling de Swile mise sur la simplicité et la modernité. Leur communication présente des collaborateurs épanouis utilisant naturellement leur carte, avec des visuels colorés et dynamiques qui contrastent avec l’univers administratif traditionnel. Leur approche « tout-en-un » répond au conflit externe, leur design et leur ton décalé valorisent le DRH moderne, et leur philosophie « réinventer les avantages salariés » propose une vision nouvelle des relations employeur-employé.
L’univers de Swile raconte une histoire cohérente, qui répond aux conflits de leurs décideurs. À vous de faire de même, pour votre marque B2B !
Créer des archétypes
Lisez un roman ou regardez un film : chaque histoire s’appuie sur des personnages. Des gentils, des méchants, des héros, des gardiens… Et c’est la même chose en storytelling.
Pour raconter l’histoire de votre marque, il est nécessaire de définir des archétypes. Camille Gillet s’inspire de ceux de John Truby : “un archétype est un modèle de personnage ou de personnalité. Pour réussir à les définir, une bonne culture est nécessaire ! Je recommande de lire des livres, regarder des films, s’imprégner de la culture populaire… Pour s’entraîner à repérer les liens narratifs, définir les personnages et rédiger un message cohérent pour répondre aux conflits identifiés précédemment.”
Mais attention à cette erreur commune : dans votre storytelling, votre marque ne peut pas être le héros ! Les héros de l’histoire, ce sont vos clients. Le méchant, ça peut être un problème rencontré par votre cible ou alors un concurrent.
Ne pas chercher à tout réinventer
Créer un storytelling, ce n’est pas (toujours) ré-écrire l’histoire de la marque en partant de zéro. Si votre entreprise B2B existe depuis un certain temps, que le positionnement est validé, que vos produits plaisent… Alors, c’est un bon signal. Et vous pouvez baser votre stratégie marketing dessus !
“Faire du storytelling, ce n’est surtout pas tout casser. On peut se baser sur l’existant, et apprendre à pousser un peu plus le curseur dans le discours de la marque. Le tout étant de rester cohérent, sans prendre de risques inutiles pour votre business.” – Camille Gillet, consultante en storytelling
Tester le storytelling en interne
Vos collaborateurs sont vos ambassadeurs narratifs. S’ils ne valident pas l’histoire à raconter, votre stratégie marketing, les éléments de communication mis en avant… Vos clients ne les valideront pas non plus.
Il est donc primordial d’embarquer vos collaborateurs en interne, avant de penser à votre storytelling en externe. C’est (presque) le même principe que la symétrie des attentions : en transformant les collaborateurs en ambassadeurs, on réussit (par effet miroir) à faire adhérer les clients.
C’est une synergie précieuse. Alors, racontez d’abord l’histoire aux collaborateurs… Pour qu’ils puissent mieux l’incarner auprès des clients.
Vos clients méritent de connaître votre histoire. Et de vous choisir pour les émotions que vous leur procurez, pas seulement pour vos fonctionnalités. Dans un monde B2B où la différenciation technique s’amenuise, votre récit devient votre avantage concurrentiel le plus durable.
Mais avant de faire du storytelling B2B une priorité, voici les 5 étapes à suivre impérativement :
- Partir du « why » de la marque : creusez au-delà de ce que vous faites pour comprendre pourquoi vous existez. C’est votre ADN narratif, la raison d’être qui donnera du sens à toute votre communication.
- Connaître son public cible : dépassez les personas classiques. Identifiez leurs conflits externes (pratiques), internes (émotionnels) et philosophiques (idéologiques). C’est dans ces tensions que naissent les histoires les plus puissantes.
- Transformer sa matière en récit : vos études de cas deviennent des épopées, vos défis techniques des quêtes héroïques. Chaque élément factuel doit trouver sa place dans une narration cohérente et engageante.
- Identifier les personnages : qui sont les héros de votre histoire ? Le ou les méchants ? La méthodologie des archétypes vous aidera à donner vie à ces protagonistes.
- Tisser des liens narratifs : créez des passerelles entre votre univers, vos solutions et les aspirations de votre cible. L’objectif : les émouvoir d’abord, les convaincre ensuite grâce au copywriting.
Le storytelling ne remplace pas la performance de vos produits, il la révèle. Alors, prêts à transformer votre communication B2B en récits mémorables ? À vous d’écrire l’histoire qui fera de votre entreprise, non plus un simple fournisseur, mais un partenaire indispensable.